Blog sur la nature et ses merveilles
Dans un monde violent, il est important de réfléchir au concept de non-violence qui ne se limite pas à l’image cent fois vue de manifestants pacifiques couchés sur le sol et dégagés manu militari. C’est ce que font avec brio Laurent Muratet et Etienne Godinot dans un livre récent *. L’un est directeur de l’entreprise de commerce équitable Alter Eco, l’autre représentant en France de l’association humanitaire Gandhi International.
La philosophie de la non-violence se base sur le refus de toute pensée, toute institution, toute action qui porterait atteinte à la vie ou à la dignité d’autrui : il y a de quoi faire ! On pourrait aussi la définir par la règle d’or commune à toutes les sagesses : « Ne fais pas aux autres ce que tu ne veux pas qu’ils te fassent. »
Gandhi considérait la non-violence comme une lutte contre l’injustice, mais sans visée de vengeance et avec, au contraire, une volonté de réconciliation et de reconnaissance mutuelle. Ces principes, si simples, sont pourtant mis à mal dès qu’un antagonisme survient.
Dans les conflits qui divisent le monde, des plus petits – en famille, au boulot, entre amis – aux plus grands, le seul vrai problème n’est pas la notion de conflit (il est normal de ne pas être d’accord sur tout), mais plutôt cette absence de respect et d’écoute de l’autre. Il y a, dans nos psychologies, comme une sorte de vice de forme qui fait que l’être humain et le groupe dont il fait partie se croient investis d’une vérité unique, supérieure à ceux d’en face.
Alors, on porte au pinacle les êtres exceptionnels qui ont réussi à transformer des situations plus que conflictuelles en terrains de dialogue : Nelson Mandela et Martin Luther King sont ainsi considérés comme des saints laïques.
Mais leur exemple, s’il alimente la philosophie des activistes, n’est guère suivi. Pourtant, une antique morale basée sur le bon sens pourrait devenir moderne : celle, par exemple, de Patanjali, le théoricien pratique des yogas sutras **, qui écrivait au ive siècle : « Les règles de vie dans la relation aux autres sont la non-violence, la vérité, le désintéressement, la modération et le refus des possessions inutiles. » Tout un programme, rejoint, entre mille autres, par Emmanuel Levinas qui a écrit cette phrase fulgurante : « Aventure absolue, dans une imprudence primordiale, la bonté est la transcendance même ! » C’est de cela que nos temps manquent : de spiritualité vécue, incarnée, manifestée en actes. Et donc tout simplement de bonté.
Marc de Smedt
* « Un nouveau monde en marche », préface de Stéphane Hessel (Yves Michel, 2012).
** Il en existe plusieurs traductions, notamment au Relié et chez Albin Michel.
Article prélevé sur le site de CLES