• La papillon sous la main

     

    La papillon sous la main

    Un très beau texte !

     

    La papillon sous la mainLa surface d’un bassin de nénuphars, flotte, immobile, un papillon blanc zébré de noir. Il est magnifique, mais est-il encore vivant ? Je glisse délicatement le plat de ma main sous lui pour le sortir de l’eau. Il agrippe ma peau de ses pattes et s’ébroue doucement. Je l’approche de mon visage pour le regarder mieux et ses yeux aussi me regardent. Il fait de petits mouvements avec ses pattes, avec ses ailes, il est en pleine confiance, savoure comme moi la plénitude de la vie.

    En ce moment de contact intense, nous sommes deux êtres conscients baignés dans un océan de nature vibrante. Il est là, je suis là, les arbres qui nous entourent sont là, tout est présence, tout est dit. Un temps passe et, sur ma main, le papillon fait un brin de toilette et de séchage. Je pose ma paume sur un rocher. Il se sert d’un de mes doigts comme d’un pont et retrouve ainsi le contact avec un sol rugueux. Quelques instants encore et il s’envole, libre, pour jouir de son éphémère existence.  

    La papillon sous la mainAprès ce moment de grâce, je pense évidemment à la célèbre phrase du philosophe taoïste Tchouang Tseu (Zhuangzi) : « Suis-je un homme qui rêve qu’il est un papillon ou un papillon qui rêve qu’il est un homme ? » Brièvement, en cette soirée d’été, les frontières entre mon petit moi et la nature s’étaient abolies.  

    Nous avons tous vécu des moments comme celui-là, où le passage d’oiseaux dans un coucher de soleil, le regard d’un chien ou d’un poisson rouge, le contact avec un cheval, une brebis, un orang-outan, n’importe quel animal et même un insecte (j’ai ainsi connu une araignée mélomane), nous ramène dans un monde édénique où nous devenons un. Nous pouvons vivre ces moments avec facilité, à condition de nous rendre totalement présents.  

    A notre époque de massive extinction des espèces, où l’on se pose aussi la question du droit à une vie décente pour les animaux d’élevage que nous parquons dans de véritables camps de concentration avant de les débiter en tranches sous cellophane, on peut se demander si nous n’avons pas perdu, en effet, un lien essentiel avec le monde vivant. Certains beaux esprits diront peut-être que c’est bien là de l’idéologie à trois sous pour végétarien. Rassurons-les, je suis omnivore. Cela ne m’empêche pas de me demander s’il n’y a pas ici une clé majeure qu’il nous faut retrouver

    Marc de Smedt

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