• Je plonge avec les requins

    Je plonge avec les requins

    © Istock

    Jean-Marie a toujours navigué en eaux troubles, avec la peur de se faire dévorer par les requins, au sens propre comme au sens figuré. Jusqu’à ce qu’il décide de plonger pour les rencontrer vraiment, à 54 ans. Et que sa vie en soit bouleversée.

    Valérie Péronnet

     

    "Je n'ai jamais été très à l'aise dans l'eau, même si j'ai appris à nager et à plonger. J’avais vu Les Dents de la mer quand j’étais petit et, depuis, j’avais toujours la peur irrépressible qu’un requin surgisse et me dévore. Ça n’est pas un très gros handicap : on peut très bien vivre sans être à l’aise dans l’eau ! C’est ce que j’ai fait. Ça ne m’a pas empêché de devenir champion de planche à voile et de traverser l’Atlantique en voilier dans ma jeunesse. Et aussi de plonger dans l’existence sans toujours être très regardant sur la qualité des eaux dans lesquelles je frayais. (..............)

     

    Première rencontre

    Un matin de janvier 2009, en compagnie de Pablo et de six autres personnes, j’ai plongé au milieu d’une dizaine de requins-bouledogues, à Playa del Carmen. J’ai eu d’abord très peur, avant d’être totalement subjugué par leur puissance et leur beauté. J’étais à genoux sur le fond, à vingt mètres au-dessous du niveau de la mer, et j’ai senti le bonheur envahir chaque parcelle de mon être. Nous sommes restés une vingtaine de minutes au milieu d’eux qui tournaient autour de nous. Ils ont fini par nous frôler, et c’était comme une caresse. Inouïe. Bouleversante. Quand je suis ressorti de l’eau, j’étais rempli d’une joie extraordinaire qui ne m’a pas quitté depuis.

    Coup de foudre

    J’ai su presque immédiatement que toute ma vie allait changer, comme après un coup de foudre : j’étais tombé amoureux de ces animaux incroyables et magnifiques. Je suis rentré chez moi et j’ai lu et appris tout ce que j’ai pu sur eux. J’ai découvert qu’on en tuait des millions par an, juste parce qu’ils nous font peur. Quand j’étais jeune, je rêvais d’être photographe. J’ai décidé de devenir photographe de requins, pour faire partager mon émerveillement au monde entier, et mettre en place une fondation pour tenter de les protéger. En deux ou trois ans, ma vie s’est complètement transformée : j’ai vendu tout ce que j’avais, j’ai appris la photographie sous-marine et je me suis mis à sillonner les mers de la planète à la rencontre des requins.

    Plus j’avançais dans ce projet et plus je sentais que j’étais enfin à ma place. J’ai fait la connaissance d’humains et d’animaux extraordinaires, qui ont profondément transformé mon rapport avec le monde, avec la vie, avec les autres, avec moi-même. J’ai appris à respecter le temps que prennent les choses, à regarder ce qui m’entoure avec confiance et acuité, à repérer et accepter mes limites, à me centrer sur l’essentiel : quand on est sous l’eau, au milieu d’animaux si parfaits et si sauvages, c’est une question de vie ou de mort. Mais surtout de vie.

     

    Changer le regard des hommes

    À force de fréquenter les requins, et les humains qui fréquentent les requins, j’ai remarqué que tous, nous nous retrouvons toujours dans un rapport de force face aux animaux, dans cette sorte de réflexe de domination qui pousse les hommes, depuis la nuit des temps, à vouloir soumettre leur environnement, la nature et toute sa faune. C’est ce regard que je voudrais changer, et c’est ce à quoi je vais consacrer le reste de ma vie.

    Il y a quelques mois, j’ai rencontré Leïna, une apnéiste qui plonge avec les dauphins. Elle m’a emmené voir “ses” dauphins ; je l’ai emmenée voir “mes” requins. Nous avons commencé à plonger ensemble, à travailler ensemble, à vivre ensemble. Et j’ai découvert ce bonheur nouveau, infini, de partager avec une compagne ce qui fait le cœur de ma vie, et le cœur de la sienne. Dans l’eau, nous sommes à l’unisson, dans une fluidité si puissante et si douce que tout prend sens. Nous attendons un bébé, sa naissance est prévue pour Noël. Je vais avoir 60 ans. J’ai enfin une relation apaisée avec ma fille aînée, devenue une belle jeune femme, et avec le reste du monde aussi, je crois. C’est comme si tout prenait enfin sa juste place dans ma vie, et que je prenais enfin ma juste place sur la terre. Il m’a fallu du temps pour ouvrir les yeux et pour comprendre mais ça y est, je crois : la beauté a chassé ma peur. »

     

    Source : psychologies.com (extraits)

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